Club écriture : textes des élèves sur le harcèlement

Point de vue interne d’un élève harcelé

Un sombre couloir sans fin

Il restait prostré comme figé, devant les portes du collège. Des dizaines d’enfants entraient en bandes bruyantes qui sans cesse l’étouffaient.

Sans ménagement, les autres le bousculaient : il n’était qu’un obstacle gênant leur passage. Et, parfois, quand on le remarquait des insultes alors fusaient. Il sortait de l’anonymat uniquement quand ce garçon en particulier, sûrement désœuvré et désireux d’amuser la galerie, s’en prenait à lui.

Il était frêle, son bourreau aussi. Pourtant, ce dernier poussé par les rires moqueurs résonnant après les coups ou remarques désobligeantes qu’il lui avait lancés ou donnés, se sentait fort et puissant face à sa victime.

Après, celle-ci, souvent se fondait dans le décor, s’effaçait devant chaque élève au point de devenir transparent. Dès qu’il le pouvait, il trouvait refuge dans les toilettes qui malgré leurs fines cloisons étaient comme un rempart qui l’isolait de tout le reste. Il fallait bien pourtant rouvrir la porte et retomber dans ce gouffre.

Non, il ne pouvait plus continuer comme cela. Il n’était plus le seul à y penser. Certains allaient même jusqu’à souhaiter sa mort, quotidiennement sur cet écran blanc où les commentaires, réponses ou photos s’ajoutaient.

De plus en plus, l’enfant se renfermait sur lui-même bien que personne dans son entourage n’ait semblé le remarquer. Pourtant, il avait tenté d’en parler mais, trop occupés, ses proches ne le prenaient pas au sérieux. Cela passerait. C’était parfois difficile de s’intégrer. Pour eux aussi, cela avait parfois été difficile de se faire des amis. Il devait s’endurcir, arrêter de pleurnicher, devenir un grand.

 

« Pourquoi ne suis-je pas comme cela ? »

La jeune fille avait 10ans, elle était en CM2 et vivait la pire année de sa vie en tant que petite fille harcelée à cause de sa couleur de peau. Tous les dimanches soirs, la veille d’une nouvelle semaine d’école, elle avait la boule au ventre car elle savait que probablement elle vivrait encore et toujours les moqueries ou autres supplices de la part de ses camarades.

 Le lundi, il fallut bien aller à l’école car son faux mal de ventre n’avait pas convaincu sa mère de ne pas l’y envoyer. A 8H30, la petite fille était devant la porte comme paralysée comme si son corps l’empêchait d’entrer. La sonnerie retentit, ce qui la réveilla. Elle avança et sentit déjà les regards méprisants qui ne cessaient de la juger. Les réflexions la rabaissant dès le matin ne s’arrêtaient jamais, et les professeurs n’arrangeait pas la situation car on ne pouvait pas dire que la petite était leur élève préférée.

 À la récrée et à la cantine elle était aussi très seule, elle revenait des cours et s’enfermait dans sa chambre en sanglotant. Personne n’était là pour la consoler à part sa sœur qui l’aidait au quotidien car ce que la petite fille vivait n’était pas gai. Malgré le fait que celle-ci tentait de vouloir  être comme tout le monde, rien ne s’arrangeait.

Finalement la petite perdit espoir et comprit qu’ils ne l’accepteraient jamais …

 

L’ENFER OBLIGATOIRE

Arrivé devant le collège, je commence à stresser alors que je n’ai même pas mis un pied dans cette enceinte sombre et infernale. Mon estomac se contracte jusqu’à en avoir la nausée. A peine rentré, les regards se tournent vers moi. Je reçois quelques sourires de compassion de certains élèves mais rien d’autre. La sonnerie retentit et je pénètre seul et tête baissée dans la classe avec la peur de croiser ce groupe qui ricane dès que je le regarde.

Pendant les heures de cours, je reçois des boules de papier sur la tête. Je me plains auprès du professeur mais rien ne change, ce dernier qui est au tableau ne voit rien. En plus, les camarades de ma classe ne m’aident pas. Pire, ils défendent avec acharnement ce groupe de harceleurs et je me sens constamment humilié et ridicule vis à vis de l’enseignant et de cette foule mauvaise qui m’ entoure.

Durant toute la journée, les moqueries et insultes se multiplient. On se moque de mon physique, de mes difficultés scolaires, on me traite de rapporteur.

A la sortie de ces murs où je souffre tant, l’enfer n’est pas terminé. Je trace ma route à toute vitesse et d’un seul coup je reçois un croche-pied puissant qui me met par terre. J’ai très mal. Mes vêtements sont tout sales et je commence à pleurer devant les caméras qui sont pointées vers moi.

Une fois rentré chez moi, je pense être tranquille mais lorsque j’ouvre mon téléphone, je remarque une vidéo de moi gisant par terre qui circule dans le groupe de la classe. Cette vidéo fait ricaner les complices de ce groupe qui ne m’aident pas et partagent la vidéo à travers les réseaux sociaux sans penser à la douleur et à la tristesse qui me consument.

Mes parents en rentrant du travail me grondent sur mes résultats scolaires et me stressent constamment en me disant que je n’ai pas d’avenir. Alors, je me faufile dans ma chambre et je m’écroule sur mon lit à bout de forces. Je ne veux plus vivre ça et je ne veux plus aller à l’école. Pour éviter de revivre constamment ce harcèlement, deux possibilités se présentent à moi : soit je retourne au collège et la propagande continue, soit j’en parle à un adulte de confiance comme la vie scolaire. Peut-être cette dernière pourra-t-elle m’extraire de ce calvaire insupportable et me permettre d’étudier sereinement. Demain, peut-être sera porteur d’espoir.

 

Les portes de l’enfer

Arrivée devant la grande porte du collège, la grande porte de cet enfer dans lequel je vis, une boule se crée dans mon ventre. J’ai essayé le matin même de convaincre ma mère de ne pas m’y emmener, en vain. Je marche jusqu’à la cour de récréation, tête baissée, essayant de me faire discrète. J’espère pouvoir m’enfoncer dans le béton du sol. Un camarade de classe me fait une remarque. Apparemment, les insultes sur les réseaux sociaux la veille ne lui ont pas suffi. Tous ceux qui sont autour de lui rient aux éclats et je sais qu’ils rient de moi.

Je regarde dans leurs yeux, ils ne rient que pour faire plaisir à ce bourreau. Les plus gentils me lancent un regard de compassion, mais ça s’arrête là. Personne ne m’aide.

Je m’assois dans un coin, seule. Je ferme les yeux, essayant de penser à autre chose, jusqu’à ce que la sonnerie retentisse.

En cours, je souris aux professeurs, j’encaisse les remarques quant à la chute de mes notes. En cours, je suis l’actrice la plus talentueuse, mais, eux, mes tortionnaires sont aussi de très bons comédiens. Chacun dans cette sinistre pièce connaît son rôle par cœur.

Quand sonne la récréation, les masques tombent et les insultes de mes camarades fusent. Je compte les heures qu’ils restent, je prie pour que tout cela s’arrête un jour.

En rentrant chez moi, je pensais que je serais enfin tranquille. Pourtant, ma mère me parle de la nouvelle mauvaise note que j’ai eue. Elle crie, désespère. Je voudrais lui donner la raison de cette chute scolaire, mais ma gorge se noue et les menaces de mes bourreaux me reviennent en mémoire. Je prétends que je suis fatiguée, et je vais dans ma chambre. Quand je ferme la porte, je m’écroule sur mon lit et des larmes roulent sur mes joues. Je ne souhaite ce quotidien à personne.